Après avoir constitué l’équipage le plus percutant du bien connu Sea Shepherd et avoir dédié leur jeunesse à la protection des océans, un collectif de 10 artistes basées autour de la grande cité maritime de Bruxelles présente ce projet qui restera inscrit dans l’histoire de la musique comme le Baleine Summer Hits 2020. Leur but, converser avec les musiciens du monde sous-marin, les baleines à bosse, et faire danser les clubs les plus branchés d’Ibiza, de Dubaï et de Berlin. Les baleines à bosse, Megaptera Novaeanglicae, produisent, principalement à la période reproductive mais aussi sur les zones de nourrissage, des chants qui se propagent sur des kilomètres. Ils sont constitués d’unités sonores, qui se répètent de manière cyclique. Ces animaux ont été vus comme étant capables de mimétisme, apprenant les unités sonores utilisées par d’autres populations et les reproduisant à travers les différents océans. Il s’agit ici d’établir un dialogue musical multiple et transcendantale, mêlant musique électronique, captations sonores éclatées et enregistrements sous-marins pris au large de l’île Sainte Marie à Madagascar.
Faire groover les fonds marins. Enfin se reconnecter à la nature. Révolutionner le monde de la musique interspécifique.

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Des heures d’enregistrements sous-marins. Du son en boite, sur disque dur, des données. A travers ce travail artistique et musical, explorer ce que la science académique soulève mais n’adresse pas, ce qui reste là, en dormance. Le ramener dans le vivant, le complexe, l’oscillant. Donner vies aux histoires qui peuplent nos horizons mouvants. Rendre le son au son, le refaire circuler, jusqu’aux tympans des créatures terrestres. Créer du lien de parenté interspécifique, celui dont parle Donna Haraway, en propageant une onde qui trouve écho juste-là, et faire espace, faire temps pour être là, justement. Chercher ce que l’humain et les baleines peuvent avoir d’espèces compagnes à travers la musique. Chercher, en se promenant dans le son comme on se promènerait dans une forêt, ou plutôt comme on plongerait en apnée dans des eaux troubles et sombres.

Les enregistrements qui pétrissent ce CD ont été pris durant les années 2015, 2016 et 2018 au large des côtes de l’île Sainte-Marie, à Madagascar. Ils sont le résultat du travail remarquable effectué par l’association Cétamada, et en particulier le Dr Anjara Saloma, que je remercie énormément pour son accueil et l’ensemble des aventures que nous avons partagées. Les sons de baleine à bosse que l’on entend sur ces enregistrements (sans doute plus de 50 individus différents) sont ceux que l’on appelle les chants, produits, principalement, par les mâles en période de reproduction. Même si cela fait sujet d’étude depuis plusieurs années, nous ne savons pas comment ces animaux parviennent à performer ces sons, dont la largeur de la bande de fréquence et la diversité est impressionnante.

Des nombreux articles et références explorent les champs de la bioacoustique et de la musique interspécifique avec un talent et une diversité d’approche qu’il serait absurde de vouloir résumer ici. Je vous propose donc ci-dessous une bibliographie commentée (extrêmement) non exhaustive permettant d’amorcer cette exploration à votre tour.

Garland, E. C., Goldizen, A. W., Rekdahl, M. L., Constantine, R., Garrigue, C., Hauser, N. D. & Noad, M. J. (2011). Dynamic horizontal cultural transmission of humpback whale song at the ocean basin scale. Current biology, 21(8), 687-691.
Ellen C. Garland et ses collègues signent ici un article remarquable analysant la transmission culturelle des unités sonores et des structures de chants chez les baleines à bosse. Cette caractéristique est aussi présente chez de nombreux autres animaux, entre autre les primates, les oiseaux et les cétacés.

www.hogradio.org/CalBirdTalk/audio_html/sampler_program.html
Rusten Hogness présente un échantillon commenté des enregistrements de la California Bird Talk. Outre son talent incontestable pour parler des oiseaux et de leur virtuosité sonore, cette émission contient des chants d’oiseaux passés au ralenti, qui rappellent fortement les enregistrements de baleines à bosse.

Songs of the Humpback Whale, Roger Payne, 1970. www.youtube.com/watch?v=sjkxUA041nM
Cet album, accompagné du travail scientifique de Katy et Roger Payne, a permis de faire découvrir, pour la première fois, les chants crées par les baleines à bosse. Il a été impulsé par des enregistrements de Frank Watlington, un ingénieur de la marine ayant détecté des sons étranges lors d’une mission secrète ayant pour but d’écouter les sous-marins russes à l’aide d’hydrophones.

Jim Nollman, Playing Music with Animals, The interspecies communication of Jim Nollman with 300 Turkeys, 12 Wolves and 20 Orcas.
Très bon album…

Je serai heureuse de pouvoir partager davantage autour de ce sujet, parlez-nous, écrivez-nous, harmonisez-nous, nous répondrons : jouliette-damien@hotmail.com.

Mastering Jonah Blumenthal et Juliette Damien
Réalisation graphique Juliette Damien
Linogravure du livret Juliette Lamas
Impression en sérigraphie à l’Atelier Clandestin

À toutes les créatures que l’océan transporte, à Magalie.


MAY MUSIC SAVE THE OCEANS - 9 pistes - 36 minutes